
Par Paul DARGENT, notre moniteur professionnel de la menuiserie.



L’envie de voyager ne suffit pas pour arriver au but … Il faudra préciser celui-ci, savoir quand partir, par quels moyens, choisir l’itinéraire, évaluer le temps nécessaire, se renseigner sur les difficultés du voyage, ordonner les étapes … et enfin se mettre en route avec une certaine détermination.
La réalisation d’un objet en bois sera grandement facilitée à celui qui accepte un minimum de méthode.
Qu’est-ce que je veux ? …
En premier lieu il est utile de préciser ce que l’on cherche : répondre à un besoin matériel, réaliser un vieux rêve, désir d’apprendre, s’occuper utilement, découvrir un métier …
Ensuite en l’absence de besoin ou de projet précis
Qu’est-ce que j’aime, ou aimerais découvrir ?
Menuiserie traditionnelle, sculpture, aménagement des combles, marquèterie …
Ces premières réponses, qui peuvent changer bien sûr, permettent de décider des premières étapes (exercices ou objets).
==> le choix de l’objet sera déterminé par l’envie, les goûts, le besoin et le niveau de connaissance(s) de « l’ouvrier ».
Il faudra apprendre en faisant, et donc choisir des travaux permettant un apprentissage progressif.

Cette étape vise à préciser l’objet à créer.
A quoi sert-il ? Où sera-t-il placé ? doit-il s’harmoniser avec d’autres meubles ? quelles sont ses dimensions ? bois massif ou bois reconstitués ?
Et encore : Est-il fait pour durer ? quel est le temps dont je dispose ? quel budget ?
Les croquis (il ne s’agit pas de bien dessiner !) permettent d’imaginer différentes solutions, jusqu’à en choisir une qui corresponde au mieux.
Le plan (vue de face, de côté, de dessus) à l’échelle oblige à choisir les sections de bois et techniques d’assemblage, prévoir les décors.
Ces choix déterminent
- l’ordre des opérations à effectuer (mode opératoire … itinéraire à suivre)
- la liste de débit, c’est-à-dire la liste de toutes les pièces utiles à la construction, avec leur dénomination, leurs cotes précises et le matériau utilisé.

à venir compléter ce dernier …
La « liste de débit » est la liste de toutes les pièces utiles à la construction, avec leur dénomination, leurs cotes précises et le matériau utilisé.
En menuiserie on note d’habitude les cotes dans l’ordre : Longueur x largeur x épaisseur.
+ Attention : la « Longueur » correspond au sens de la fibre du bois, dans les panneaux il arrive qu’elle soit plus courte que la « largeur ».
+ N’oubliez pas de tenir compte des tenons, languettes, qui sont invisibles sur un meuble fini.
Le mode opératoire permet de vérifier le matériel (outils machines) nécessaire au travail et les techniques à apprendre. Tenant compte de cela, on peut estimer le temps de la réalisation … et remplir son agenda.
A partir de la liste de débit, on peut évaluer le coût de l’ensemble et aller faire les courses.
+ Le bois doit être sec, propre, exempt de poussières ou résidus (bois de récupération, palette, poutres …).

L’idéal est d’avoir toutes les fournitures (bois, quincaillerie) avant de commencer l’usinage.
On va d’abord pré-découper toutes les pièces du « puzzle » en rajoutant 1 cm à toutes les cotes de la liste de débit.
C’est l’occasion de choisir chaque élément dans le bois disponible en fonction de sa position dans le meuble et de son rôle.
C’est un temps d’observation des qualités et des défauts du bois à travailler et de décision pour en tirer le meilleur parti.
+ On commence par les pièces les plus longues
+ Il faut avoir tracé toutes les pièces avant de couper
+ Le bois « travaille » : attention au sens des fibres, aux fentes, nœuds, bois de cœur, dosses qui entraînent des déformations ultérieures
+ Ne pas débiter des pièces trop courtes (< 30 cm) : qui ne pourraient pas être travaillées avec les machines
Matériel utilisé :
+ Mètre, crayon, règle …
+ Scie circulaire portative, scie égoïne
+ Scie à ruban, scie circulaire

Le corroyage correspond à la mise à la bonne section des différentes pièces obtenues après le Pré-Débit. Il s’effectue en deux étapes :
- Dégauchir
Il s’agit de dresser les bois : rendre une face « plate » et un chant (côté) droit et d’équerre (90°) par rapport à cette face.
Ce travail se fait avec la dégauchisseuse (autrefois, la varlope). - Raboter
Le rabotage (fait à la raboteuse …) permet de calibrer les bois afin qu’ils aient la même épaisseur d’un bout à l’autre.
Il arrive que les cotes des pièces finies ne correspondent pas aux cotes prévues dans la liste de débit (sections trop faibles, défauts) ; on corrigera la liste à ce moment-là.

On coupe chaque pièce à sa bonne longueur
Tenir compte de l’épaisseur des traits de coupe
Bien positionner la coupe dans la partie « chute »
Matériel utilisé :
Scie égoïne à dents fines
Scie à onglet
Scie radiale ou circulaire
ÉTABLISSEMENT
Cette opération a pour but de nommer chaque pièce et de la positionner dans l’ensemble.
Les signes d’établissement notés d’habitude sur la face visible ou « parement » permettent de reconnaître et orienter les éléments à la reprise du travail.

Les signes opposés en vis-à-vis en haut des montants.

Le signe inscrit au milieu des traverses les positionne et ordonne.

Le signe indique le sens d’un montant intermédiaire
TRACAGE
On trace sur chaque pièce les usinages qu’elle recevra… : signes d’établissement des assemblages.

Comment ça tient ?
Les bois peuvent être cloués, vissés, collés, maintenus par de la quincaillerie, assemblés par tourillons, lamelles … ou assemblés par rainures / languettes ou tenons et mortaises…
Le choix du mode d’assemblage dépend du matériau, de la résistance souhaitée, de l’esthétique, du temps disponible.
Autrefois, la menuiserie traditionnelle imposait des assemblages ajustés et sans colle ; aujourd’hui, l’usage et l’évolution des produits permet de marier les matériaux ou d’oser de nouvelles formes (lamellé collé, cintrage …).
Rainure / languette
Permet d’assembler des panneaux ou planches (parquet, dessus de table…)
Matériel utilisé : toupie ou scie circulaire
Peut être remplacé par tourillons / lamelles
Tenon / mortaise
Type d’assemblage le plus traditionnel, solide ; destiné aux piètements de tables, tabourets, armoires, portes …
La mortaise étant déterminée par le diamètre de l’outil, on la fera avant les tenons.
On utilise aussi l’assemblage à mi-bois, la queue d’aronde pour des travaux particuliers
Nous avons complété ce sujet d’assemblage à l’aide de l’article de Mihai “Les assemblages en menuiserie”

Chantourner, c’est découper le bord d’une planche suivant un dessin. Celui-ci doit être prévu dès le début (largeur de la pièce et position des assemblages).
Ces formes font partie du décor et sont réalisées après un « montage à blanc » du meuble, c’est-à-dire sans colle. Ce montage permet de vérifier la qualité des assemblages et de voir l’aspect général).
Les découpes se font sur la scie à ruban (il faut monter une lame fine si les courbes sont serrées) ou bien à la scie sauteuse, plus pratique.
Les petites découpes (bois de 15 mm d’épaisseur maximum) peuvent être faites sur la scie vibrante ou scie à chantourner.
Ensuite le chantournement est repris et régularisé à la râpe ;

Les moulures font aussi partie de la décoration. Ce sont des formes que l’on donne au chant des pièces.
Les plus classiques sont (on peut ajouter à chacune de ces moulures un «carré ») :

Certaines moulures sont attachées à un style particulier (Louis XV, XVI, Restauration, Louis-Philippe…). Le goût de chacun reste le meilleur critère de choix.
Elles sont réalisées sur la toupie : ne vous y aventurez pas sans une solide information, cette machine est une grande mangeuse de doigts !
On peut aussi le faire à la défonceuse (portative ou sur table) moins puissante que la toupie elle est plus maniable et moins dangereuse.
Couleur du bois, forme du meuble, chantournements et moulures sont les quatre possibilités de décor, à vous de les équilibrer, tout en respectant la structure et l’usage de l’ensemble.

Des particules d’abrasif peuvent rester dans les pores du bois après ponçage, aussi, on ne ponce qu’après avoir terminé l’usinage.
Le ponçage est une étape très importante pour la finition d’un ouvrage.
Malgré toutes les précautions prises lors de l’exécution et du collage, il subsiste de légères différences de niveau ainsi que des traces de corroyage qui seront éliminées à l’aide d’un racloir et/ou d’une ponceuse électrique (ou encore d’un ponçage à la main).
Le ponçage à la main s’effectue au moyen d’une cale enveloppée dans un morceau d’abrasif.
Habituellement on ponce toutes les pièces avant le montage final surtout celles qui ne seront plus accessibles après.
Respecter le sens de la fibre
On peut poncer d’abord en « travers fil », pour rattraper une différence de niveau, mais il faut finir dans le sens du fil.
Commencer avec un grain moyen (80 à 120)
Puis terminer avec un grain fin (180 à 220)

Le collage d’un meuble est une opération délicate qui doit se faire rapidement avant le séchage de la colle. Plus la température est élevée, plus la colle sèche rapidement.
Il faut d’abord tout préparer : l’endroit, la colle, les serre-joints, un maillet, des cales de serrage, une éponge et un seau pour le nettoyage.
Dans le cas d’un meuble, on assemble d’abord les deux cotés, puis l’ensemble face et arrière.
Le temps de prise de la colle (« blanche ») va de 15 à 45 minutes selon la porosité du bois (et selon la température). Il faut compter12 heures pour un séchage complet.
N’oubliez pas de vérifier l’équerrage de chaque élément, puis de l’ensemble ; l’égalité des diagonales reste le moyen le plus fiable pour cette vérification.
Après montage, on reponce l’ensemble du meuble en commençant par les zones d’assemblage.

En général on teinte le meuble après son montage définitif ; On peut cependant le faire avant (meuble bicolore ou trop important).
La mise en teinte s’effectue à l’aide de teinture (à l’eau ou à l’alcool). La teinture s’applique au pinceau, à l’éponge, …
La teinture à l’eau redresse les pores du bois, ce qui oblique après séchage à effectuer un léger ponçage à l’aide de laine d’acier (paille de fer). Recommencer l’opération jusqu’à obtention de la teinte voulue : la teinte finale correspondra à celle obtenue avant le séchage de cette dernière.
N’oubliez pas de bien brosser et dépoussiérer le bois : des particules de fer peuvent rester et former ensuite des tâches en s’oxydant.
Une fois la teinte bien sèche, passer un coup de l’aine d’acier puis appliquer la finition voulue (vernis, cire, …)
Les liaisons d’établissement

Les assemblages des cadres et bâtis (tenon et mortaise)




Les assemblages des tiroirs et des caissons

Les assemblages des panneaux multiplis et agglomérés


Les signes d’établissement
